• Montrouge réinvestit la porte d'Orléans.

    Les transports en commun ont désormais la cote auprès du grand public*[1], et ça se voit. A tel point qu’ils sont devenus, pour les opérateurs gestionnaires publics ou privés, ou les institutions qui les financent, un important instrument de communication à leur service. Les exemples sont légions, à l’image Archiguide.des campagnes de pub de la SNCF ou de divers constructeurs*[2] qui surfent sur le succès du TER (Train express régional), du lancement récent des mini-guides « Archibus » (c.f ci-contre) qui permettent à la RATP de lier son image à la ville, à son dynamisme, à son histoire, etc., ou encore des annonces des différentes collectivités territoriales qui insistent sur leur implication dans le financement des réseaux. Un autre exemple récent en témoigne : la présence très remarquée de la RATP à la onzième biennale d’architecture de Venise qui se tient jusqu’au 23/XI/2008. Celle-ci y expose quelques-unes de ses réalisations (en cours ou à venir), parmi lesquels le poste de commandement du XVe arrondissement (destiné à la ligne 12 et dessiné par Emmanuel SAADI) ou le tout nouveau centre-bus de Thiais (photo ci-contre).Centre bus de Thiais.

    Arrêtons-nous un instant sur l’un de ces projets : celui du futur centre-bus de Montrouge, situé Porte d’Orléans, et qui s’étend sur près d’1,7 hectare. Jusqu’à présent, ce dernier se faisait plutôt discret (à l’image de ses semblables, rarement « sexy » esthétiquement) avec notamment une entrée plus ou moins dissimulée en fond de cour, rue du Père-Corentin (photo ci-dessous, à gauche), et des façades discrètes, pour ne pas dire carrément insipides, d’abord boulevard Jourdan et surtout rue de la Tombe-Issoire (ci-dessous, à droite). Or, la RATP a souhaité profiter d’une opération d’agrandissement de son centre de remisage (nécessitée par l’accroissement de l’activité bus en intra-muros) pour [ré]affirmer sa présence dans le quartier. Et notamment profiter de la bonne image dont elle y jouit suite notamment à l’arrivée du tram à cet endroit.

    Devrait donc voir le jour ici, entre 2009 et 2011/2, un tout nouveau complexe comprenant un centre bus réaménagé,Centre bus de Montrouge. plus grand d’une dizaine de places (qui s’ajoute aux 140 déjà existantes), des logements sociaux et une résidence étudiante, le tout en situation de porte-à-faux. Un concours d’architecture, relayé par une exposition du Pavillon de l’Arsenal, s’est tenu en 2007 et a vu s’affronter plusieurs équipes démontrant l’intérêt certain porté au lieu : entre autres Abalos & Herreros, Feichtinger Architectes, Frédéric Borel, Brossy et associés, etc.

    L’opération a été scindée en deux lots, le lancement du second suivant la réception du premier. Le « lot 1/Jourdan » concerne la réalisation de 150 logements sociaux (près de 15 000 m²) ainsi que la restructuration du centre-bus lui-même. L’Atelier SERAJI Architectes associés, lauréat de cette partie du concours, a créé un bâtiment à la Centre bus de Montrouge.forme irrégulière (façade et volume), généreux en espaces extérieurs, privatifs et collectifs (balcons et terrasses, cour, etc.). Et comme convenu, a limité les espaces communs aux deux ensembles (centre-bus et logements) qui cohabiteront ici. Seule la rampe d’accès « bus » aux parkings souterrains est visible en façade. Même si la régie, par le biais de son logo apposé sur celle-ci, affirme bel et bien sa présence sur le site (il s’agissait même d’une de ses exigences - photo ci-dessous).

    Le second lot, dénommé « Issoire », a été confié, lui, à Eric LAPIERRE et concerne la réalisation de 350 logements étudiants. Le bâtiment doit son aspect atypique à la véritable cicatrice diagonale qui court sur toute sa face du rez-de-chaussée jusqu’à son sommet. Ce qui permet d’y loger les espaces de circulation desservant chaque niveau, et notamment l’ascenseur-funiculaire, indéniable clin d’œil au commanditaire. Parallèlement, des lieux de rencontre indispensables à la vie Futur centre bus de Montrouge.étudiante y prennent place, tout comme des jardins d’hiver privatifs de 2 m². Extérieurement, il n’était peut-être pas le plus gracieux des projets en compétition, et il apparaît bien imposant par rapport aux bâtisses plutôt discrètes des alentours (montage de droite). Toutefois, il n’écrase tout de même pas le quartier comme aurait pu le faire un IGH (et comme ne manquera pas de le faire la Pyramide-Triangle d’Herzog & de Meuron porte de Versailles !).

    Les futurs bâtiments envisagés devraient indéniablement dynamiser ce petit « quartier » (morceau de quartier serait plus approprié) coincé entre la trépidante Porte d’Orléans, la trouée verte de Montsouris et l’ovni architecturalo-urbanistique que représente la Cité U de la porte de Gentilly.Futur centre bus de Montrouge. Tout en conférant une nouvelle image à ces lieux de stockage pour véhicules lourds (bus, tram, etc.) qui n’étaient pour les riverains jusqu’à présent au mieux qu’une tare visuelle, au pire une importante source de nuisances sonores.

    Mais, au-delà de cela, ce qui se joue avec ce projet (ou avec les autres mis en avant à la biennale par la régie), c’est le rôle qu’entend désormais jouer la RATP (comme d’autres acteurs des transports d’ailleurs) daPub RATP.ns la ville, et dans la politique urbaine de demain. Prenant conscience que son image ne se joue plus exclusivement dans ce qu’elle fait pour les déplacements quotidiens des citadins, mais aussi dans ce qu’elle réalise et commandite dans la cité. D’ailleurs, signe de ce changement, la régie ne se contente plus de proposer aux Parisiens et Franciliens de faire « Un bout de chemin ensemble », mais bien de leur faire « Aimer la ville ». Tout un programme…

    Eric BAIL pour èV_

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    [1] Lire à ce sujet l’article du monde « Les transports en commun, victimes de leur succès » (édition en ligne du 16/IX/2008).

    [2] Je pense notamment à Bombardier qui s’expose, en ce moment, en grand Gare de Rouen, ou qui mit il y a quelques mois « si modestement » en scène son succès dans l'attribution du marché « Francilien », au Champ de Mars, devant l’Ecole militaire.

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    Vidéo Cap24/Pavillon de l’Arsenal : « la RATP, maître d’œuvre » :

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    Sources : « Centre bus de Montrouge et construction de logements » cyberarchi.com ; « Opération Montrouge 75014, 2 concours d’architecture » dossier de presse Pavillon de l’Arsenal, pdf téléchargeable sur leur site.

    Crédits photos : centre-bus de Montrouge (état actuel), photographies personnelles prises les 20/21 et 27/IX derniers ; cyberarchi.com (centre-bus de Thiais) ; pavillon de l'arsenal (photos-montages des projets).

    Nouvelle version du dimanche 13/VI/2010.


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