• Hallywood.

    Il y a de cela quelques semaines, France 3 Île-de-France/Centre diffusait l’excellent documentaire de Frédéric BIAMONTI, « Le destin des Halles », datant de 2004. On y apprenait avec intérêt que les habVue générale Les Halles.itués de la piscine Suzanne Berlioux nageaient sans savoir que la voie express des Halles leur passait juste au-dessus de la tête. Tandis que la protubérance en béton qui surplombe les escalators menant à l'un des plus grands complexes cinématographiques parisiens*[1], et qui du même coup casse la perspective depuis la place Carré, en était le prolongement. On y découvrait ensuite derrière une porte tout à fait banale et surtout parfaitement accessible du premier sous-sol, une station de taxis, prévue initialement pour déposer et/ou reprendre les clients du forum, mais qui est restée totalement déserte. Avant qu’une autre porte (celle-ci verrouillée) ne nous fasse parvenir directement sur les quais de la station « Les Halles » de la ligne 4 du métro (direction Porte de Clignancourt).

    C'est justement cet enchevêtrement qui pose de sérieux problèmes quant à la rénovation du centre*[2]. Pourtant, cela n’empêchait pas le documentaire de se terminer sur une note tout à fait positive, à savoir, la désignation du lauréat du concours du réaménagement. On y annonçait même le début des travaux pour l’année 2008 ! Force est de constater que plus de quatre années se sont écoulées depuis et rien n’est encore définitivement acquis en la matière. On est même encore loin des premiers coups de pioches, de pelles ou de quoi que ce soit d’autres*[3].

    Alors, certes, on préfère désormais y regarder à deux foNouveau jardin des Halles.is avant de détruire quelque chose dans ce quartier encore traumatisé par la mise à terre des somptueux pavillons BALTARD dans les années 1970*[4]. Et, attitude louable, le maire de Paris et les équipes travaillant sur ce dossier ne veulent pas non plus renouer avec le temps où Jacques CHIRAC, autoproclamé architecte en chef, avait recalé le projet choisi par les Parisiens afin d’imposer ses propres vues. C’est pourquoi Bertrand DELANOË a décidé de prendre son temps sur cet épineux sujet et de consulter énormément les associations de riverains.

    Mais, du coup, en a résulté la non-décision du 15/XII/2004 sur le choix de la proposition déjà très consensuelle de David MANGIN (c.f photo ci-dessus). C’est-à-dire que son idée de carreau de verre transparent et suspendu était bien retenue afin notamment de réaménager les sous-sols du Forum*[5], mais son seul geste architectural en tant que tel,  lui, pourtant déjà minimaliste, n’était pas validé. Et un second concours sur l’architecture du carreau était même lancé dans la foulée par le maire de Paris qui rappelait, en jouant tout de même à l’équilibriste, que MANGIN bien que recalé restait associé à la réalisation du projet et devenait une sorte de conseiller spécial.

    Les « véritables » arJardin lalannechitectes du futur carreau ont depuis été désignés, il s’agit de Patrick BERGER et Jacques ANZIUTTI, et pourtant rien ne semble être davantage au point mort que la situation actuelle. On reporte sans cesse le début des travaux, et les différentes associations de riverains se font entendre et menacent désormais de porter l’affaire devant les tribunaux si on ne les écoute pas sur tel ou tel point, comme sur le déplacement du jardin Lalanne (mini lunapark pour enfants, photo ci-contre) situé à « l’entrée des vastes gradins censés relier la future grande pelouse à la place basse du Forum ».

    On serait tenté de croire qu’une sorte de malédiction pèse sur ce quartier depuis le XIXe siècle*[6], et on commence même à désespérer de voir un projet cohérent et pérenne sortir des cartons un jour. On cherche depuis longtemps à édifier dans la banlieue parisienne un « Hollywood » à la française, vu les péripéties et rebondissements qui caractérisent l’aménagement du cœur de Paris, on l’a peut-être trouvé. Espérons juste que comme dans le temple du cinéma américain, les histoires d’« Halles[ywood] » se terminent par une « happy end ».

    Eric BAIL pour èV_

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    [1] Il s’agit du multiplexe UGC Ciné-Cité Les Halles qui était en 2004 le premier ciné parisien (et français) en terme de fréquentation (3 159 000 entrées), devant l'UGC Bercy. Il se classe également troisième en Ile-de-France quant au nombre de fauteuils (plus de 3 200). Source : quid.fr

    [2] Dernier exemple en date, alors que les travaux pour le réaménagement du jardin ont débuté en surface (depuis début V/2010), les autorités compétentes (maîtres d’œuvre et d’ouvrage), ainsi que les architectes se sont aperçus que divers locaux techniques implantés sous dalle et formant de véritables verrues en surface représentaient un défi considérable en vue d’aplanir le terrain. Etape pourtant indispensable dans l’optique de la création du futur jardin et de la perspective que l’on comptait créer de la Halle aux Blés jusqu’à la rue de la Cossonnerie. Bilan : des avenants de plusieurs milliers d’€ supplémentaires passés (ça commence, même si cela est généralement courant dans le cadre d’un marché public) et un premier casse-tête à gérer, où recaser tout ça ! [Note de nouvelle version].

    [3] Les travaux en surface ont en réalité, enfin, débuté depuis début V/2010. Même si quelques soucis apparaissent déjà (voir ci-dessus), et qu’on l’on évoque également des interruptions plus ou moins prolongées du fait de divers recours en justice. [Note de nouvelle version].

    [4] Pavillons qui furent précipitamment détruits entre 1970 et 1973 pour laisser la  place au fameux trou des Halles avant que l’actuel Forum et les tristement célèbres « Parapluies » de WILLERVAL n’émergent du site en 1983. Un des pavillons (exemple ci-dessous, du temps de leur splendeur), le numéro 8 qui abritait le marché aux oeufs et aux volailles, a tout de même été sauvé et a été reconstruit à Nogent-sur-Marne en 1976 et somptueusement mis en valeur. Il a étéJardin lalanne classé depuis monument historique. Sa reconversion en salle de spectacles a largement démontré qu'il aurait été possible de transformer autrement les Halles de Paris, et ce même s'il fallait effectivement aérer le cœur historique de la capitale. En conserver quelques-unes au milieu de la verdure, comme le montre l'exemple nogentais, eu sans doute été la bonne solution.  Source : pavillonbaltard.fr

    [5] Pour amener clarté et luminosité dans le centre commercial et surtout dans le noeud de transport que représente la station Chatelet/Les Halles (lignes A, B et D du RER ; lignes 1, 4, 7, 11 et 14 du métro)

    [6] Voir à ce sujet l’anecdote rapportée par Michel RAGON au sujet de la désignation de BALTARD pour l’aménagement des Halles et les péripéties qui en découlèrent ; Baltard, le faussaire, pp. 240-245 in RAGON (Michel), Histoire de l’architecture et de l’urbanisme modernes, t.1 Idéologies et pionniers 1800-1910, Paris, Editions du Seuil, 1991, 375 p.

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    *En complément, vous pouvez consulter le site internet des riverains qui comptent suivre les travaux ici ; ou divers ouvrages parus à l’occasion, comme celui sur la refonte du jardin, références : Collectif (BOUGNOUX Florence, FRITZ Jean-Marc, MANGIN David), Les Halles, villes intérieures, Paris, Parenthèses Editions, 2008, 180 p, ici.

    Sources (y compris pour les photographies, et photo/montages) : batiweb.com ; paris.fr ; internaute.com.

    Version du 28/VI/2008 publiée sur PériphériK, actualisée pour èV_ le jeudi 10/VI/2010.


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