• Les tramways parisiens ne se sont pas serrés la [petite] ceinture.

    La Cour des comptes est certes en ce moment au cœur de l’actualité et comme groggy suite au décès brutal de son très charismatique et dynamique premier président, Philippe SEGUIN, et alors que l’on vient d’apprendre, ce jour [ndlr 23/II/10], la nomination à ce même poste du député socialiste Didier MIGAUD, sur décision du président de la RépubliT3 sur les Maréchaux.que, Nicolas SARKOZY. Elle n’a toutefois rien perdu de sa verve. C’est ainsi qu’elle vient d’épingler dans son rapport annuel [délibéré le 07/V dernier] la RATP et diverses institutions/administrations, à propos de leurs choix quant au retour du tram dans le sud de la capitale.

    Mais, que reprochent les magistrats de la rue Cambon exactement à nos édiles et à la régie à ce sujet ? Entre autres, que le prolongement de T2 jusqu’à la porte de Versailles n’aurait peut-être pas du prendre la forme qu’on lui connaît depuis maintenant quelques mois. Et que le tracé adopté pour T3, s’il peut politiquement se comprendre et s’expliquer, ne se justifiait sans doute pas ou difficilement au vu des inconvénients qu’il comportait.

    Quand gagner est déjà joué !

    Dans ce dossier en effet, était-ce même tout simplement utile de participer ? Tout n’était-il pas tronqué dès le départ ?

    Ce sont en substance les questions que se pose la Cour dans le rapport, tant nombre de « décisions sujettes à caution » semblent avoir été prises. Tant aussi les autorités dirigeantes et organisatrices dans leur désir de réaménager la ville, d’instaurer une nouvelle façon de penser les déplacements urbains, voire dans leur souT3 sur les Maréchaux.ci de surfer sur une vague écolo/populo/bobo, ont sans doute occulté aveuglément les tares et les faiblesses de l’option « voirie/Maréchaux » au détriment de l’option « petite ceinture ferroviaire » qui sans être la panacée présentait tout de même nombre d’avantages. Aveuglement qui conduisit même RATP et décideurs à proposer presque systématiquement parades et solutions aux problèmes parfois soulevés avec insistance par certains observateurs avisés qui soulignèrent le risque à terme pour la bonne gestion du dossier.

    Ainsi, selon la Cour, pourquoi avoir sans cesse surestimé la vitesse commerciale, ainsi que le débit-voyageurs de l’option « T3/Maréchaux » ? Les chiffres avancés étant parfois difficiles à croire : jusqu’à 20 km/h de vitesse commerciale et 100 000 voyageurs/jour. Alors même que le choix de l’insertion au sein d’une circulation déjà dense et hétéroclite, ne pouvait que ralentir à terme la vitesse d’exploitation*[1]. Sans même évoquer le problème de la congestion automobile du sud parisien que ne manquerait pas de poser l’adoption du projet « voirie ». Inconvénient inexistant dans l’autre option en site « réellement » propre et qui présentait lui des pointes de vitesse avoisinant les 30 km/h, sans gêner aucunement le trafic automobile. Tandis que le faible nombre de stations engendré par l’option « Maréchaux », une quinzaine, du fait de l’empreinte voirie lourde des aménagements mais aussi de la nécessité de maintenir une vitesse d’exploitation convenable en évitant la multiplication du nombre d’arrêts, réduisait l’offre de feu-PC1, sans concerner un bassin de population porte d'Orléansplus important que dans l’option « belle endormie ».

    C’est pourquoi, pour contrer les détracteurs et afin de couper court à tout début de polémique, la parade ici fut toute trouvée et sans cesse agitée comme la panacée : « priorité aux feux ». On voit aujourd’hui les conséquences que cela peut avoir au quotidien sur la vitesse du T3 (notamment aux heures de pointe, à peine 15/16 km/h, contre un peu plus de 14 pour l’ex-PC1 sans priorité aux feux), sur la circulation automobile (bouchons interminables de part et d’autre des Maréchaux), et sur la gestion de la voirie également (présence quasi-permanente de forces policières et/ou de régulation).

    D’autant que deuxième argument avancé par la Cour pour condamner les instances organisatrices de transport dans ce dossier, les solutions non retenues, voire pour certaines d’entre-elles à peine envisagées voire évoquées, auraient été moins coûteuses. Sans même parler de la rentabilité financière à terme du projet T3 option « Maréchaux » apparemment également surévaluée. Globalement, le coût total avoisinerait désormais les 350 millions d’€ auxquels il faut bien évidemment ajouter la vingtaine de millions d’€ liée à la requalificatioPetite Ceinturen urbaine, et les quelques deniers publics qui avaient déjà été consacrés à un premier aménagement de voirie lors de la partition de la ligne PC en trois tronçons en 1999. Bref, au final, T3 aura compté cher aux contribuables franciliens, et la régie pourrait bien avoir succombé aux sirènes de la com’ au détriment de la rentabilité économique du projet.

    Alors certes, la remise en service de la ligne PC aurait indéniablement, elle aussi, coûté très cher, et divers problèmes sous-évalués et/ou peu quantifiés par les diverses études et liés à la vétusté des installations et infrastructures, ou à la gestion d’un environnement délicat (habitations proches, bruit pour les riverains, oppositions diverses notamment de la part de ces derniers, travaux difficiles, etc.) n’auraient sans doute pas manqué de faire grimper les coûts. Toutefois, pour le savoir, pour évaluer faisabilité et fiabilité de l’option « petite ceinture », pour assurer en somme une compétition saine et équitable, il aurait fallu creuser un peu le dossier « PC ». Et par exemple, ne pas occulter systématiquement les études qui lui étaient favorables (notamment le rapport RFF d’IV/06), en allant jusqu’à nier leur existence.

    Bis repetita !

    Et comme une mauvaise nouvelle n’arrive jamais seule, la PC (en tant qu’infrastructure de transport) allait en quelque sorte mourir une seconde fois. Avant sans doute d’être définitivement enterrée sous le projet de « micro-ceinture verte » envisagé par la mairie de Paris. En fait, « micro-tronçon vert » puisque le saucissonnage et le démantèlemenT2 Porte de Versaillest ont déjà commencé en divers endroits du tracé (travaux à l’ouest sur les sites France-Télé et gare d’Auteuil, et à l’est autour du pont National).

    En effet, le prolongement du T2/Val-de-Seine jusqu’à la porte de Versailles, tôt envisagé et récemment inauguré, a délibérément écarté la réutilisation du tronçon PC entre « Garigliano » et le parc des expos. Lui préférant, une fois encore, une option « voirie » plus visible à travers Issy-les-Moulineaux et le sud du XVe arrondissement de Paris. Décision contestable et qui, derechef, a fait fi des critiques et des rapports prouvant le plus grand intérêt à relancé l’exploitation de la PC plutôt qu’à opter pour un T2/voirie : davantage de populations concernées, vitesse d’exploitation supérieure, moindre coût global, meilleure rentabilité à long terme, etc. D’autant plus que dans l’option finalement choisie, T2 aboutit désormais au cul-de-sac de la porte de Versailles, sans lien direct avec T3 (un boulevard et une place les séparent). Ce qui tend à prouver le manque de vision à long terme de nombre de nos décideurs. En effet, n’aurait-il pas été plus judicieux d’envisager une réutilisation de la PC à partir du pont du Garigliano, permettant ensuite de pousser plus à l’est et au nord ? Mais, il est vrai que le prolongement de T3 jusqu’à la porte de la Chapelle, via les Maréchaux, était déjà dans les cartons ! (et sur les murs du relT2 Porte de Versaillesais-com’ de la mairie, à savoir le pavillon de l’Arsenal par le biais d’une expo fin 2008). Ce qui tend également à prouver que l’éventualité d’une utilisation « fret » des lignes projetées n’a jamais véritablement été envisagée. Sinon, il est fort à parier que la PC aurait emporté la partie, sachant que la part fret sur T2/T3 et T3 prolongée se réduit, et se réduira toujours, à néant.

    En somme, et c’est bien ce qu’à dénoncé la Cour dans son rapport, outre les innombrables incohérences soulevées et pointées, c’est que pratiquement personne n’a sérieusement envisagé une réutilisation de la PC. Personne [j’entends chez nos chers décideurs] ne semble même lui avoir donné une chance de pouvoir un jour renaître de ses cendres, écartant tout ce qui pouvait la présenter sous un jour favorable. La cantonnant à un « second » rôle, et la condamnant à ne plus être qu’un « sentier nature » comme le proclamait haut et fort l’exposition publique à la mairie du XVIe arrondissement en XI/XII/06.

    Eric BAIL pour èV_

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    [1] Et sachant aussi que le succès serait au rendez-vous, vu le nombre de voyageurs déjà transportés par les bus PC1 avant l’inauguration du tram. Chiffres sans cesse en augmentation et atteignant déjà les 80/85 000 voyageurs/jour. Ce qui ne pouvait se traduire pour T3 que par une diminution de sa vitesse d’exploitation.

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    Sources : LAVAL (Patrick), DUMONT (François), La cour des comptes attaque le tram des Maréchaux, Ville, Rail & Transports magazine, 2010, #489, p.30-39.

    Crédits photos :

    ü  Photo 1 : Tram T3 quittant la station Balard et passant devant le bassin d'essai, photo personnelle prise le 21/III/09 ;

    ü  Photo 2 : terre-plein central du T3 près de la porte d'Orléans, photo personnelle prise le 27/IX/08 ;

    ü  Photo 3 : Porte d'Orléans, photo personnelle prise le 26/XII/08 ;

    ü  Photo 4 : paysage "petite-ceinture" porte de Charenton, photo personnelle prise le 08/V/09 ;

    ü  Photo 5 : derniers travaux Porte de Versailles sur la ligne T2 avant inauguration, photo personnelle prise le 02/VII/09 ;

    ü  Photo 6 : résurgence de la PC au parc Montsouris, photo personnelle prise le 27/IX/08.


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