• Bienvenue à vous sœurs et frères homo-urbanus ! Bienvenue chez vous, puisque èV_ (prononcer ève, bien qu’il s’agisse du « u » latin) est le blog de la communauté urbaine, de l’espÈce Vrbaine, celle qui est née et s’épanouit dans ce milieu qui vous est si familier, la ville. Sans plagier ce qui se fait sur la toile, je tenterai de vous informer ici sur ce qui fait bouger notre milieu [si peu] natunycrel, mais dans lequel nous nous sentons si bien. Auront leur place sur èV_ la plupart des disciplines et/ou champs disciplinaires relatifs au monde urbain : urbanisme, architecture, sociologie, histoire, mobilité, etc. Parallèlement, tous les supports qui évoquent l’Urbs dans notre monde contemporain, les débats qui l’animent, les [r]évolutions qui le bousculent, les transformations qui le frappent, à l’image de la photographie, des expositions, de la presse, de l’édition, du net, de la vidéo trouveront toute leur place sur èV_.

    Mon propos ne sera pas centré sur la France et sur sa capitale, toutefois en raison de mes origines géographiques, il est tout de même évident que la dominante franco-francilienne l’emportera. J’espère en tout cas vous apporter à travers ce projet, sans prétention, ce que l’on ne trouve pas forcément sur la toile, à savoir un rapide tour d’horizon sur le monde urbain tel qu’il nous apparaît de nos jours, dans toute sa complexité et sa richesse.

    Pour gagner en cohérence et en clarté, et afin de vous faciliter la navigation sur le site, sept catégories ont été créées. Elles regroupent par grandes thématiques, l’ensemble des articles publiés à ce jour sur L’espèce Vrbaine. Vous pouvez les retrouver dans la colonne de droite, ci-contre. J’y ai également détaillé dans une autre liste l’ensemble des papiers publiés à ce jour, avec des liens pour vous y conduire. Bonne lecture.

    Si vous avez des suggestions pour le faire évoluer, ou des précisions à apporter sur tel ou tel point, n’hésitez pas à laisser commentaires et/ou rectificatifs.

    Eric BAIL pour èV_


    1 commentaire
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     « Nous sommes en 2010 après Jésus-Christ. Toute la Gaule est occupée par la racaille et les pauvres... Toute ? Non ! Un  village d’irréductibles classes moyennes supérieures et de cadres résiste encore et toujours à la chienlit. Et la vie n’est pas facile pour les voyous des cités délabrées et délaissées de Clichy, Meaux, Créteil et Corbeil… »

    C’est ainsi que l’histoire pourrait commencer. Et pour beaucoup, c’est même ainsi qu’elle s’écrit de plus en plus au pays d’Astérix, dont vous aurez évidemment remarqué le clin d’œil avec cette courte introduction abusivement subjective.

    En effet, la semaine dernière (ndlr – mardi 14 septembre 2010), la multinationale du divertissement américaine, la Walt Disney Company, et l’Etat ont signé une prorogation de treize ans de la convention qui les lie dans l’est parisien depuis 1987, et qui devait s’achever initialement en 2017. Un nouveau Disneyland Affiche.partenariat qui vient confirmer, et même considérablement amplifier, certaines clauses du précédent. Faisant resurgir du même coup le spectre d’une libéralisation/privatisation totale de la ville à quelques encablures seulement de la capitale.

    Car, plus qu’à un mariage d’égal à égal, c’est davantage à la signature d’un néo blanc-seing en faveur des saltimbanques US que nous venons d’assister. Dans l’indifférence quasi générale et alors que l’empire yankee et son interprétation de l’american way of life ont déjà ravagé une partie de la Seine-et-Marne depuis vingt ans.

    Je ne parle évidemment pas des deux parcs d’attractions dont on ne peut contester aujourd’hui l’impact plutôt positif sur l’emploi ou l’image de la région. Après tout, entre 12 et 15 millions d’entrées y sont enregistrées chaque année (source : insee.fr). Quant au « Tchernobyl culturel » dénoncé il y a vingt ans par Ariane MNOUCHKINE, co-fondatrice du Théâtre du Soleil, il semble maintenant bien loin. Jeunes et vieux, autochtones et touristes, élites et France d’en-bas se côtoient désormais allégrement et sans remords dans le monde merveilleux de Disney.

    Ce qui pose davantage de problèmes, c’est la mainmise exercée par la firme nord-américaine sur une grande partie de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée, le secteur IV précisément*[1]. Avec le consentement bienveillant des dirigeants loCarte Marne la Vallée.caux, régionaux et de l’Etat, à court d’idées tout autant que d’argent. Et l’avenant de cette semaine vient encore conforter cette grande latitude d’action des laborantins de chez Mickey en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire sur cette zone de l’Ile-de-France. Et même bien au-delà, puisque le périmètre désormais concerné par la nouvelle convention a été étendue de 1 900 ha à plus de 2 200.

    Traduction : on connaissait déjà depuis vingt ans le Val-d’Europe avec son architecture kitsch et pastiche, ses habitants plutôt privilégiés, sa centralité consumériste*[2], en somme son urbanisme post-providentialiste*[3]. Désormais, il faudra s’habituer dans les années futures au stade supérieur de l’anti-ville. En effet, associée au groupe touristico-immobilier de masse Pierre & Vacances/Center Parks, la Disney Company envisage la création ex-nihilo de villages (auxquelles pourrait même s’ajouter un troisième parc !), établis autour de principes urbanistiques et sociétaux qui échapperont totalement au contrôle de l’aménageur public. La loi SRU (ndlr – celle qui impose à chaque commune de consacrer au parc social au moins 20 % de ses logements) n’y sera sans doute pas la bienvenue, tout comme du reste au Val-d’Europe depuis l’origine, même si la firme annonce sur les 20 000 logements permanents à édifier, un tiers de sociaux (source : challenges.fr des 14 et 15/IX, ici). A suivre !

    Les arguments des opposants au « tout Mickey » pourraient capitaliser sur ces thématiques pour attiser la mobilisation. Mais, dans un monde où l’individualisme prime et où l’ultralibéralisme a triomphé, celle-ci devient bien difficile. Peut-être plus encore dans un pays où le président avait justement choisi le monde merveilleux de Mickey pour médiatiser sa nouvelle relation sentimentale.

    Evidemment, ce sont surtout les promesses d’investissements considérables, autour de deux milliards d’€ (mais on évoque le chiffre de huit milliards à terme – source : lenouvelobs.com du 15/IX), et les créations promises d’emplois (jusqu’à 70 000) qui sont alléchantes pour un pays en panne de croissance. Même si la firme étatsunienne démontre ici son adresse en la matière puisqu’elle incorpore dans ce chiffre les emplois directs évidemment, mais aussi indirects et induits. Ce qui n’est pas tout à fait la même chose. Mais, ceux qui pourraient relever le subterfuge, à savoir nos dirigeants, n’ont sans doute pas l’intelligence d’Ulysse et ses compagnons et se laissent in fine tenter par le chant des sirènes…

    Pire même, puisqu’en sus des concessions accordées, le conseil général de Seine-et-Marne d’abord, avant le conseil régional d’Ile-de-France où l’unanimité a prévalu entre tous les partis politiques, excepté les Verts, se sont engagés à divers aménagements en faveur de la compagnie américaine. Prolongement d’Eole (Rer E) que l’on attend pourtant davantage à l’ouest de Paris ; construction de nouveaux accès autoroutiers (A4) en pleine forêt de Seine-et-Marne, qu’il est loin le Grenelle de l’environnement, et diverses créations ou extensions de lignes de transport, les 600 000 usagers quotidiens qui s’entassent dans les rames d’une ligne 13 au bord de l’explosion apprécieront le geste… Les premiers coups de pioches sont, eux, annoncés pour 2015.

    Le banquet aura alors peut-être bien lieu au village, mais dans le rôle du barde muselé tenu à l’écart de la fête, Assurancetourix, on pourrait bien y retrouver l’Etat français, c’est-à-dire nous.

    Eric BAIL pour èV_

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    [1] Elle est l’une des cinq villes nouvelles de la région parisienne, créées à partir de 1965, avec Cergy-Pontoise, Melun-Sénart (qui deviendra Sénart), Evry et Saint-Quentin-en-Yvelines. Composée de trois, puis quatre secteurs (Porte de Paris, Val Maubuée, Val de Bussy et le petit dernier le Val d’Europe), elle regroupe vingt-six communes (liste exhaustive sur le site du département de la Seine-et-Marne, ici). Elle regroupait en 2007 environ 250 000 habitants, dont 12 000 pour les cinq communes (Chessy, Serris, Magny-le-Hongre, Coupvray et Bailly-Romainvilliers) du secteur IV.

    [2] Je parle évidemment du centre commercial du secteur IV construit dans un pur style pastiche « baltardien XIXe». Espérons que les générations futures ne se feront pas une idée des pavillons de BALTARD, les vrais, à partir de cette abominable copie.

    [3] Excellemment mis en évidence par le journaliste Hacène BELMESSOUS dans son petit opuscule « Le nouveau bonheur français ou le monde selon Disney » aux éditions de l’Atalante, sorti en 2009.

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    Sources : BELMESSOUS (Hacène), Le nouveau bonheur français ou le monde selon Disney, Editions de l’Altalante, Nantes, 2009, 155 p. ; insee.fr ; la-seine-et-marne.com ; lenouvelobs.com ; challenges.fr ; leparisien.fr ; wikipedia.org.

    Merci à Raphaëlle, Lorène, Yann et Julien pour les corrections qu’ils ont apportées à cet article. 


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  •          Alors voilà, c’est fait… enfin presque ! Toutes ces années à avaler avec modestie ces dizaines de milliers de kilomètres d’asphalte brûlante, toutes ces années à supporter sans broncher ces milliards de voyageurs grincheux et irrespectueux, toutes ces années à lutter avec âpreté avec plusieurs centaines de mes semblables dans des rues toujours trop étroites, toutes ces années à respirer dans ces interminables embouteillages cette pollution persistante n’y auront donc rien changé. Ils envisagent de me mettre au placard dans un avenir proche et de me remplacer par … de drôles de plate-formes semi-aériennes sur rails qu’ils ont eu l’audace d’appeler « bus volants » !
    Un comble pour moi et les miens qui bus volant.avions si brillamment et si rapidement réussi à évincer de la plupart des grandes cités du monde « moderne » ces véritables fossiles ferrés qu’étaient les tramways. Nous qui disposions alors sur ces vestiges du passé d’une nette supériorité technique (on ne disait pas encore technologique), d’une plus grande flexibilité et fiabilité, et, argument ultime, d’une meilleure rentabilité. Et c’est sans regrets que nous les avions vu partir à la casse, et sans retenue que nous nous moquions des copains, notamment San-Franciscains, qui n’avaient pas réussi à les chasser de leur terre.
    Nous aurions pourtant dû avoir le triomphe plus modeste, et se douter que cette conjoncture favorable ne pourrait se prolonger ad vitam æternam. Car après cet âge d’or pendant lequel presque rien, ni personne n’arrêta l’adaptation des villes à nos seuls besoins, des voix commencèrent à s’élever ici et là pour contester notre hégémonie et remettre en cause notre supériorité naturelle sur les autres modes de transports urbains.
    Néanmoins, du haut de notre domination, rien ne semblait pouvoir nous ébranler. Et c’est sans inquiétude et même avec un certain dédain teinté d’ironisme, que nous accueillirent le retour des trams à nos côtés en ville à partir de la fin du siècle dernier. C’était sans voir que le contexte avait bel et bien changé et que le fossé, notamment d’un point de vue technique et économique, qui nous séparait autrefois de ces derniers s’était largement comblé. Si bien qu’en très peu de temps, on nous rendit responsable de tous les maux de la société urbaine : pollution, congestion, étalement spatial, etc. Situation qui poussa certains d’entre-nous à se travestir pour survivre en ville, les copain(e)s « trans » de Nancy en savent quelque chose*[1].
    Alors, c’est vrai, notre pitance coûte et coûtera de plus en plus cher dans les décennies à venir, réduisant d’autant notre rentabilité. C’est vrai, notre flexibilité légendaire s’est amoindrie d’année en année avec l’affectation de la plupart d’entre-nous à un trajet défini. C’est vrai aussi que l’augmentation exponentielle du trafic automobile dans les grandes villes du monde nous a réduit à des performances dont ne rêvent peut-être que ces machines à deux roues qui ont, elles aussi, fait leur réapparition à nos côtés en ville. Et avec qui il est même bien difficile de cohabiter d’ailleurs. C’est vrai enfin que nos qualités techniques ne sont plus aussi déterminantes dans le match qui nous oppose désormais aux trams tant ces derniers se sont modernisés. Ils ont même réussi un joli tour de passe-passe puisque les opinions publiques mondiales, et surtout leurs dirigeants, les considèrent désormais comme la réponse la mieux adaptée au défi écologique qui se dessine [sic].
    Je me disais néanmoins que depuis sa conversion à l’Boulevard Place Tien An Menutra-libéralisme, ma bonne vieille ville de Pékin m’avait offert sur un plateau un radieux avenir routier. Imaginez les amis ! Sept périphériques de deux fois quatre voies et des artères ouvertes à l’hausmanienne dans de vieux îlots et représentant de véritables autoroutes urbaines. Un véritable paradis terrestre !
    Ce qui n’a fait qu’amplifier le choc lorsque j’ai appris, il y a quelques semaines, ce projet un peu fou mais non moins sérieux de bus à roulettes. Mon huile n’a alors fait qu’un tour. Même si, je dois le reconnaître, l’idée est intéressante. Je suis même contraint d’avouer qu’ils ont une certaine élégance ces mastodontes du futur. Haut perchés (près de cinq mètres) et au design soigné (large baies vitrées, lignes épurées, etc.), ils glissent gracieusement au-dessus de la cohue automobile et de tous ses problèmes. Tandis que nous nous faufilons, nous, pendant ce temps là si péniblement au sein d’un trafic de plus en plus anarchique. D’ailleurs, c’est même cet affranchissement de la chaussée et de la circulation lambda qui représente leur principal atout. En effet, sans emprise au sol, et en laissant passer ainsi sous leurs cabines les autres véhicules automobiles, ils pourraienbus volant.t selon l’instigateur du projet, M Song YOUZHOU [Pdg de Shenzhen Haschi Future Parking Equipment], qui n’est pas avare de chiffres, réduire de 20 à 30 % les embouteillages à Pékin. Je demande à voir. Sachant que ma ville compte déjà plus de cinq millions de voitures, chiffres en hausse chaque année, il est peu probable que quelques lignes de « bus volants », dans un premier temps six kilomètres puis cent quatre-vingt peut-être d’ici un an, viennent résoudre comme par magie tous les maux urbains liés au tout-auto. Certes, ces usurpateurs sur pattes transporteront également davantage de passagers que mes semblables et moi-même : jusqu’à 1 400 contre une centaine pour les meilleurs d’entre-nous. Et, ils pollueront moins que nous autres avec leurs panneaux photovoltaïques embarqués et leur propulsion électrique. Quant à leur vitesse de croisière, elle atteindra des sommets en comparaison des nôtres, de 40 à 60 km/h.
    Mais, qui peut croire que la cohabitation de ces plate-formes avec tous les autres usagers de la route se fera sans encombre ? Même si M. YOUZHOU évoque une signalisation spécifique, et des avertisseurs sonores pour prévenir tout danger de collision. Et quid de leur coût ! Après tout, s’ils resteront en-deçà des prix affichés par leurs cousins souterrains en raison surtout du peu d’aménagement qu’ils nécessitent, ils demeureront tout de même nettement plus chers que nous au kilomètre : entre 12 et 15 millions de ¥. Et que dire des infrastructures à édifier, notamment les fameuses stations sur pilotis, qui elles requièrent espace et lourds aménagements. Enfin, rien n’est encore construit. Et si plusieurs constructeurs automobiles chinois ont répondu favorablement à l’appel, de grands défis techniques et technologiques ne manqueront pas de surgir face à un tel projet. Et les retards, échecs, tâtonnements auront peut-être raison d’eux avant la généralisation du concept. Après tout, un précédent existe : le Maglev de Shanghai. Un véritable succès technologique, mais un retentissant échec commercial…
    D’ici là, je m’en remets à notre saint patron pour qu’il nous protège, Saint Georges [du nom d’un ami inconditionnel de la machine et du moteur du siècle dernier, un ancien président de France je crois…]
    Eric BAIL pour èV_
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    Vidéo de présentation (BFM) du projet :

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    [1] Je fais bien sûr référence ici au fameux tramway hybride de Nancy qui peut soit rouler sur rails, soit s’en affranchir et se faire bus. Lire à ce sujet : L’histoire mouvementée du tramway de Nancy, dossier réalisé par M. MARCHAL, consultable à cette adresse.
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    Sources : afp.com ; photos sur google images et photographie personnelle (place Tien An Men) prise le lundi 26 juillet 2010.


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