• On ne présente désormais plus Jacques HERZOG et Pierre de MEURON, les architectes suisses qui ont réalisé le très atypique, mais néanmoins somptueux, stade de Pékin pour les dernières Olympiades, c56Leonard Street.onnu pour un temps encore sous le nom de nid d’oiseau. Leur imagination débordante pourrait faire émerger avant 2010, en plein cœur de Manhattan, un autre bâtiment tout aussi emblématique dans le paysage urbain contemporain, le « 56 Leonard Street » (c.f ci-contre), du nom de la rue où il sera implanté*[1]. Il s’agit en fait de créer, à New-York, une  nouvelle tour de cinquante-sept étages. Finalement, rien de très original me direz-vous dans une ville qui compte tant de gratte-ciel. Mais, la particularité du projet, car il y en a une, tient à la forme qu’ils comptent donner à ce futur bâtiment et qui est due à la sup56Leonard Street.erposition faussement anarchique des 145 appartements que comptera la tour. Ce qui rompt du coup avec l’image que l’on se fait traditionnellement d’un tel édifice, à savoir plutôt linéaire et monolithique.

    Et en regardant les premières images du projet, on se dit que les architectes suisses ont du s’éclater peu de temps avant de se mettre au travail au jeu de société « Jenga » qui consiste simplement à empiler les uns sur les autres de petits parallélépipèdes de bois que l’on a délicatement retirés de la base, sans mettre le tout à terre. Ce qui finit par créer des formes complètement délurées que l’on pensait bien ne jamais observer dans nos villes tant elles sont aux antipodes des codes architecturaux classiques. Si tant est qu’ils en existent encore, tant il est vrai que ces dernières années des bâtiments aux formes impensables il y a peu ont jailli ici ou là*[2]. En tout cas, ces « maisons empilées dans le ciel », selon les propres mots des architectes, dont les surfaces s’échelonneront d’une centaine à près de 600 m² pour les plus luxueuses*[3] et qui seront nous dit-on personnalisées à l’extrême, créent de par cet empilement désordonné, de véritables espaces extérieurs qui permettront aux habitants de s’ouvrir davantage sur leur ville. Tout en jouissant de terrasses aménageables plus que confortables.

    A la base de cette véritable caJenga.scade de verre, on trouvera une sculpture signée Anish KAPOOR (c.f ci-dessous), à qui l’on doit déjà la magnifique « goutte de mercure », la Cloud Gate, située dans le Millennium Park de Chicago*[4]. A New-York, le volume d’acier sphérique qu’il réalisera a été voulu afin de souligner l’imbrication de l’art/de la culture et de la ville.

    En tout cas, si l’on relève l’indéniable originalité de ce projet urbain, il faut toutefois signaler que Nicolas SCHÖFFER, un utopiste des années 1960, mort en 1992, avait imaginé pour la Défense une tour, non pas similaire, mais qui présente de nombreux points communs avec celle envisagée par les architectes suisses. Avec son « totem de l’an 1990 » qui devait atteindre 347 mètres de haut (c.f ci-dessous), il envisageait effectivement déjà la superposition de sept plates-formes au sein d’une structure d’acier géante avec de nombreux espaces en porte-à-faux comme des restaurants, des salles de conférences, des aires d’observation, etc. Le tout pouvant accueillir près de 15 000 personnes*[5]. Quant aux terrasses créées56Leonard Street par ce décalage structurel, et si chères au projet HERZOG/De MEURON, ne font-elles pas penser aux fameux lotissements fermés à alvéoles de Le CORBUSIER qui prévoyait de véritables jardins d’agrément de 50 m² suspendus et se juxtaposant les uns les autres. Endroits d’où, disait-il, « on mange, on cause et on se repose à l’air »*[6]. Finalement, seul le positionnement en Tour Totem.porte-à-faux des balcons du « 56 Léonard Street » diffère du projet de leur illustre prédécesseur et concitoyen. Ce qui souligne néanmoins au passage l’intérêt actuel des architectes pour la situation en porte-à-faux d’une partie de leur construction. Pensons notamment à l’hôtel réalisé à Barcelone par le Français Dominique PERRAULT et dont la façade ressemble à un de ces téléphones portables à façade coulissante.

    En tout cas, la cascade d’appartements des architectes suisses trouvera, n’en doutons pas, très rapidement sa place dans la jungle urbaine new-yorkaise.

    Eric BAIL pour èV_

    Note de nouvelle version (dimanche 13/VI/2010) :

    Lors de mon passage dans la « grosse pomme », fin avril/début mai 2010, la tour des architectes suisses n’était pas encore commencée.

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    [1] En réalité, il verra le jour au croisement de cette rue Leonard Street et de celle de Church Street.

    [2] Je pense bien sûr à la Taipei 101 (forme de bambou) ; à la tour du centre financier de Shanghai (forme de décapsuleur) ; ou à la Torre Agbar barcelonaise (phallus ou suppositoire c’est selon), mais il en existe bien d’autres évidemment.

    [3] Et qui se vendront entre 3,5 millions de $ (2 millions d’€) et 33 millions de $ (23 millions d’€).

    [4] Le blog archiact.fr vous en parlait dans le papier « A drop of mercury ».

    [5] Source : cahier de l’exposition « C’était l’an 2000, le Paris des utopistes », édité par la Mairie de Paris et qui reprend des pages d’un Paris-Match publié dans les années 1960, Paris, 1998, pages centrales ; voir également sur ce sujet ce lien intéressant.

    [6] Source : Le Corbusier, « Urbanisme », Paris, 1994, Champs Flammarion, pp. 194-197.

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    Sources : lemoniteur.fr ; archiportale.com (également pour les photos du projet).


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  • - Attention, il s’agit ici de la deuxième partie de l’article sur Jussieu -

    - LA PREMIERE EST CONSULTABLE EN CLIQUANT SUR CE LIEN -

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    On l’avait laissée en crise, on la retrouve en pleine restructuration. On parlait de démolition, on envisage aujourd’hui son extension. Jussieu renaît incontestablement depuis quelques années et il était temps. Ap4/transports.rès tant de projets et d’études avortés, alors que certains auraient sans doute pu entraîner sa renaissance ou sa revitalisation rapides, et après tant de déboires, comme la découverte d’amiante sur tout le site, à la fin des années 1990. Alors, certes, les décennies de retard accumulées ne pourront sans doute jamais être rattrapées et plusieurs milliers d’étudiants et de chercheurs en souffriront encore pendant de nombreuses années. Mais le mouvement semble désormais irréversible : le nouveau Jussieu est bel et bien arrivé ou du moins est-il en cours de livraison.

    Jussieu delenda est !

    La vitalité actuelle et retrouvée de Jussieu fait en tout cas complètement oublier les longues années de tergiversations qui ont suivi l’abandon du projet d’ALBERT dans le courant des années 1970. Epoque difficile où l’on se demande alors s’il est opportun de poursuivre l’idée originelle de l’architecte et compléter le gril, simplement la repenser et y apporter donc de légères retouches, ou bien en prendre le contre-pied total en détruisant le tout, ou en modifiant profondément la structure générale ?

    Et les trois décennies qui suivent (1970, 1980 et 1990) tournent constamment autour de ces questions sans réponse(s). D’autant plus difficiles à résoudre que les moyens de l’université française restent dans ces années plus que limités. Et, c’est l'une des raisons qui poussent nombre de ses détracteurs à réclamer corps et âmes sa destruction. Ce qui, de surcroît, couperait court à ces débats sans fin.

    En 4/transports.tout cas, Jussieu demeure constamment, pendant ces années, au cœur des préoccupations, démontrant tout l’intérêt porté au site. Chacun y va de sa petite proposition sur la question dans les milieux spécialisés. Même s’il s’agit peut-être aussi pour eux de se faire un nom ou de la publicité en proposant une idée originale et/ou forte pour un lieu emblématique de la capitale. Et même si, par un étrange paradoxe, cette époque pourtant marquée dans la capitale, pour le meilleur et/ou pour le pire, par les grands travaux (surtout mitterrandiens) la laisse étrangement irrémédiablement à l’écart, comme une belle endormie à laquelle il ne faut surtout pas toucher. Toutefois, une étape importante pour le campus, et sa survie, est franchie avec l’érection au coin nord-ouest de l’institut du monde arabe (IMA - photo ci-dessus), signé Jean NOUVEL, au début des années 1980. Ce dernier fait comprendre avec son projet qu’il est tout à fait possible de tirer le meilleur parti de l’existant, tout en ouvrant de nouvelles perspectives. L’IMA adopte, en effet, à la fois le même gabarit que les barres de CASSAN, tout en repensant le rapport de cette zone avec le reste de la ville, et notamment des quais. Et surtout, avec les propositions de NOUVEL pour le reste du campus*[1], l’architecte vient confirmer ce que les différentes propositions avant lui avaient déjà en grande partie souligné, à savoir que le pari ne peut être gagné que par la conception d’opérations urbanistiques d’envergure, et non plus exclusivement architecturales. Même si pa4/transports.rallèlement l’édification de bâtiments symboles (ce que rependra à son compte, bien plus tard, le cabinet « Périphériques » avec son Atrium ; c.f ci-dessus) demeure indispensable pour marquer, notamment les esprits. En tout cas, dès lors, la quasi-totalité des propositions qui suit, tend à repenser Jussieu dans son ensemble, en l’ancrant notamment plus solidement à la ville, aux quartiers qui l’entourent, et en lui conférant une échelle plus « humaine », moins monumentale*[2].

    Est-on enfin entré dans une nouvelle ère pour l’université, celle du déclin inexorable du « Jussieu delenda est » ? Pas si sûr. En effet, ses partisans ont encore de la voix et le prouvent quand éclate le scandale de l’amiante en 1996. Faisant repartir de plus belle la fronde anti-Jussieu. Néanmoins, même les plus ardents défenseurs de cette solution comprennent qu’il est bien impossible désormais de rayer de la carte un tel endroit qui rassemble tout de même nombre de chercheurs et universitaires français parmi les plus éminents dans leur discipline. Et si de nombreux débats, toujours aussi passionnés, ne manquent pas d’éclore dans ces années, l’avenir du campus s’éclaircit tout de même de plus en plus, notamment avec les décisions prises par les instances dirigeantes confirmant son désamiantage. Et si dix années sont encore nécessaires avant que ne débutent réellement ces travaux, il semble désormais acquis que Jussieu connaisse une nouvelle vie sans tourner le dos à son passé.

    Après la pluie, le beau temps !

    Et c’est vrai que les choses bougent enfin sur le campus, après ces années d’errements. A tel point que toute marche arrière paraît désormais bien impossible et que les décisions prises ont définitivement fait taire les défenseurs de la table rase qui n’avaient toujours pas désarmé. D’ailleurs, la tour Zamansky désossée et qui reçoit actuellement une nouvelle tunique flambant neuve, ose même les narguer en affichant fièrement sur ses panneaux le slogan suivant : « L’avenir est un présent que nous fait le passé » pour bien montrer que Jussieu est désormais installé(e) pour de bon dans le paysage parisien*[3].

    Mais, c’est bien l’ensemble du campus qui subit de4/transports. profondes transformations. Et d’abord le gril non achevé d’ALBERT, véritablement au petit soin. Progressivement désamianté, puis réaménagé par tranches, il se métamorphose esthétiquement. Et quiconque arrive par la rue Guy de la Brosse, perpendiculaire au campus, peut aisément le constater (photographie ci-dessous). Tandis que la dalle, elle, est profondément remaniée et réaménagée*[4]. L’objectif étant évidemment d’amarrer davantage l’université au quartier qui l’entoure. Ce qui passe par la destruction partielle de la dalle, notamment à proximité des tours de liaiso4/transports.n, permettant ainsi l’aménagement de pentes douces qui la relie directement à la voirie environnante. Alors certes, l’esprit initial de la séparation des circulations s’estompe avec ces lourdes restructurations, mais son organisation, sa perception (notamment auprès des riverains, mais aussi de ses utilisateurs), gagnent indéniablement en lisibilité.

    Quant au tristement célèbre  « no man’s land » qui sépare le gril d’ALBERT des barres de CASSAN, au nord, près des quais de Seine, il connaît un développement inédit. Et, on ne se contente désormais plus d’ériger ici ou là de simples constructions pour palier le manque criant de locaux. On crée, on planifie. C’est d’ailleurs ici qu’a été édifié le magnifique bâtiment coloré du cabinet « Périphériques Architectes », qui dévoile tout le potentiel que l’on peut dégager du lieu. Ce bâtiment, appelé l’Atrium, vient compléter partiellement le gril au sud, et le rend p4/transports.lus attrayant à un endroit où il repoussait il y a encore peu de temps. Sa trame extérieure et ses couleurs chatoyantes attirent les regards. Tandis que la pente douce et rougeâtre nous conduit doucement de la dalle à la rue, ou vice-versa, et ce, sans contraste violent (c.f ci-dessus). Et c’est également à cet endroit qu’est envisagé le projet « Pariparc », du même cabinet d’architecture, et qui pourrait encore accroître l’attractivité du campus. Voire le bouleverser durablement en créant ici la nouvelle entrée magistrale de l’université. Il ne serait alors plus si excentrique d’envisager combler l’entrée actuelle pour réorienter Jussieu sur les quais et la Seine, comme tant de projets l’ont déjà proposé dans le passé, et comme imaginé et planifié à l’origine.

    Evidemment, les puristes regretteront la dénaturation faite aux idées originelles. Confirmée également par l’aménagement récent de logements pour les étudiants, chercheurs, ou « erasmus » sur les pignons non terminés et longtemps délaissés au nord du gril. Ce qui souligne le renon4/transports.cement définitif à l’achèvement de ce dernier. Même s’ils pourront se consoler avec le départ, total et irréversible, de Paris VII-Denis Diderot vers un autre lieu de la capitale, le quartier Masséna/Rive gauche*[5]. Ce qui a réglé l’épineux problème qui n’a cessé d’agiter le campus depuis sa création, à savoir la cohabitation difficile, pour ne pas dire impossible, de deux universités antagonistes sur le même site. Alors qu’à l’origine, un seul grand pôle universitaire scientifique d’envergure devait occuper l’endroit.

    L’histoire de la faculté des sciences de Paris-Centre a donc été des plus mouvementées depuis une quarantaine d’années. Et, pour beaucoup, elle reste un échec monumental, inadaptée à ses fonctions. En tout cas, si nul ne sait encore aujourd’hui précisément ce qui se fera dans les années à venir, ni même si elle sera un jour enfin achevée, peu sont ceux qui osent désormais jouer les cassan[dre] !

    Eric BAIL pour èV_

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    [1] Ce dernier propose de noyer, comme d’autres l’avaient imaginé avant lui, le campus dans la verdure. Toutefois, originalité de son projet, il envisage de le faire par l’envahissement du jardin des plantes tout proche. La rue Cuvier disparaissant du même coup.

    [2] Parmi celles-ci, on trouve la mission MACARY, du nom de l’architecte-urbaniste M. MACARY, qui envisage par exemple des allées plantées ou une nouvelle continuité barres/gril ; ou encore, la réflexion AUTHEMAN, du nom de l’architecte chargé de l’étude, et datant de 1988, qui envisage l’aménagement de deux grandes voies, la première Est/Ouest, la seconde Nord/Sud. Plus d’infos, consulter l’article de Christian HOTTIN.

    [3] La nouvelle tour Zamansky a été inaugurée fin 2009, et s’il est vrai qu’elle est resplendissante, notamment en pleine nuit, elle s’écarte un peu de la tour d’origine (disparition de ses plaques de marbre de Carrare). Si vous voulez (un tout peu petit peu) plus d’informations sur celle-ci, un modeste (avant un plus gros) ouvrage a été édité, références : LAMARRE (François), La tour de Jussieu/Thierry VAN DE WYNGAERT, Paris, Archibooks (collection l’esprit du lieu architecture), 2010 ; 12,90 €.

    [4] Comme autour de la tour 16, c.f parisregards.fr.

    [5] Le site de Jussieu étant encore tout de même si fortement associé à Paris VII qu’en tapant « Jussieu » sur Goo…, vous tomberez encore sur le site internet de l'université Denis Diderot. Situation qui devrait sans doute perdurer un moment encore.

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    Sources : HOTTIN (Christian), « Jussieu l'inachevé, 50 ans de projets pour la faculté des sciences de Paris-centre », Livraisons d'histoire de l'architecture, n°13, IX/2007, pp. 23-51 ;

    Si vous voulez également lire un excellent article sur l’histoire de l’université de Jussieu, je ne saurais trop vous conseiller le papier de Bernard MARREY, paru dans le quatrième numéro de la revue Criticat (de IX/2008), et intitulé « Qui veut noyer Jussieu l’accuse de l’amiante », pp. 4-21.

    Crédits photos : photographies personnelles prises sur le campus en 2008 et 2009 (notamment au cours des journées du patrimoine en fin d’année).

    Première version du 10/X/2008 publié sur PériphériK ; remise à jour en date du mardi 08/VI/2010.


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  •          Le tout nouveau siège de la télévision d’Etat chinoise, la CCTV pour China central television, s’élève progressivement dans le skyline de Pékin. Et sa forme, plutôt originale et spectaculaire, ne passe pas inaperçue malgré un paysage urbain déjà fortement marqué par des œuvres  phares, commCCTV et TVCC.e le « Nid d’oiseau » ou « l’Aquacube » pour ne citer que l’architecture olympique toute récente. Les derniers panneaux de verre viennent d’être installés sur les façades anguleuses du bâtiment qui devrait être complètement achevé et inauguré courant 2009. Le CCTV Center est né de l’imagination toujours débordante de l’architecte hollandais Rem KOOLHAAS à qui l’on doit déjà la sublime et déconcertante bibliothèque centrale de Seattle (2004 ; c.f ci-dessous) ou l’ambassade des Pays-Bas à Berlin (2003), à la fois sobre et aguicheuse*[1].
    Cette nouvelle réalisation du Néerlandais, associé pour l’occasion au cabinet allemand OMA, devrait, en tout cas, devenir l’édifice central du nouveau CBD [Central business district] de la capitale chinoise*[2]. Car, en plus d’accueillir le nouveau siège de la CCTV, avec Bibliothèque Seattle.tous les espaces que cela implique, à savoir studios d’enregistrement, centres de production, etc. ; il devrait également comporter en son sein un centre culturel consacré à la télévision, baptisé TVCC (Television cultural center), de 116 000 m², un hôtel 5*, un théâtre de 1 500 places assises et de vastes espaces réservés aux expositions. La création d’un « Media-Parc » est, en outre, prévu, ainsi que des jardins publics. Les touristes devraient également être à la fête puisque les concepteurs leur ont réservé un parcours, le « Visitor’s Loop » qui, dit-on, « changera leur regard sur le monde des médias » en leur rendant accessible le monde de la production télévisée. Il est vrai que l’on ne doute pas un instant de la volonté des dirigeants de la télévision chinoise de nous dévoiler toutes les coulisses du métier avec la plus parfaite transparence [sic]. Il pourrait davantage s’agir d’un Disneyland de l’info puisque l’on parle d’un parcours exclusivement conçu pour les visiteurs d’un jour qui découvriront les différents aspects du processus de CCTV.production. Voilà qui est nettement plus conforme au « made in China ». Enfin, l’étage le plus élevé du bâtiment, à plus de 230 mètres du sol, devrait accueillir un musée des médias et une terrasse panoramique qui permettra d’avoir l’une des plus belles vues sur la ville de Pékin.
    Sur l’architecture proprement dite, le bâtiment doit sa forme particulière à la combinaison de deux volumes qui s’épanouissent à partir d’une plate-forme commune en partie souterraine et qui finissent par se rejoindre à plus de 230 mètres du sol, en créant une sorte de saillant suspendu dans le vide. Les deux branches latérales en forme de double « L » semblent s’appuyer l’une sur l’autre dans un très beau mouvement. Leur très légère inclination laisse immédiatement penser qu’ils se soutiennent mutuellement. Rem KOOLHAAS réinvente finalement l’Arche de la Défense en 2008, en brisant la base et le sommet, et en les enfonçant par leur milieu dans des directions opposées. Pour couronner le tout, une grille complexe de supports transversaux eCCTV.n acier, et qui devient irrégulière au sommet de l’édifice comme pour souligner la violence faite à la structure, accentue l’idée de fragilité de l’ensemble qu’il faudrait comme venir renforcer et consolider. En réalité, celle-ci a été étudiée pour lui conférer une grande capacité de résistance dans une région à haut risque sismique.
    Le CCTV Center une fois achevé, dans moins d’un an, devrait sans aucun doute devenir l’un des hauts lieux du tourisme pékinois. Peut-être le sera-t-il également, dans les années à venir, sur le plan politique, même si partir à l’assaut d’un tel édifice paraît plus difficile que le château de Versailles ou la Maison Blanche russe !
    Eric BAIL pour èV_
    Note de nouvelle version (dimanche 13/VI/2010) :
    Le siège de la CCTV a été inauguré pour les JO2008. En revanche, son annexe/TVCC qui n’était pas encore achevée début 2009 a subi de lourds dégâts suite à un incendie qui s’est déclaré dans la nuit de la fête des Lanternes le 09/II/2009. Pendant plus de six heures, le feu a ravagé ses cinquante étages (pour 150 m de haut). Voici deux vidéos, une de l’incendie, et une des dégâts le lendemain :

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    [1] Sans oublier ses très nombreux projets qui ne verront jamais le jour, comme ses multiples tours de verres colorées pour le quartier des Halles ou ses recherches sur le réaménagement de la dalle de la Défense.

    [2] Le prestigieux « Time » en fit une icône dès 2004 alors que les travaux commençaient à peine, voir ici.
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    Source : archiportale.com.


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  • « Cachez cette tour que je ne saurais voir » : voilà ce que dirait sans doute Tartuffe aujourd’hui pour résumer le débat sans fin sur l’opportunité de construire, ou non, des IGH (Immeuble de grande hauteur) dans Paris intra-muros. Le lundi 16/VI/2008, lors d'une séance du Conseil de Paris, une énième prise de bec entre les groupes vert et socialiste a éclaté à ce sujet, sous le regard amusé des élus UMP de la capitale qui n’ont, il est vrai assez hypocritement, pas participé au débat. Les élus « écolo » ont demandé « l'organisation d'un référendum d'initiative locale » sur cette question. Tandis que Mme HIDALGO, première adjointe PS au maire de Paris chargée de l'urbanisme, leur reprochait dans le même temps de traiter celle-ci « de façon caricaturale ».

    Ce n’est pas que je sois un inconditionnel des IGH, surtout lorsqu’ils sont implantés sans aucune opération urbanistique d’envergure**, à l’image de la tour Montparnasse*[1], mais n’est-il tout de même pas temps d’outrepasser clivages et querelles intestines, pour faire enfin progresser les choses sur ce sujet*[2] ? On en est encore à discuter de la hauteur limite de construction toujours fixée par le PLU parisien*[3] à 37 petits mètres. Même si un tabou semble levé puisqu’on accepte enfin de parler de révision afin de la porter à plus « de 50 mètres [...] voire plus haut encore pour les activités économiques et les grands équipements publics ».

    Certes, les réticences seront encore nombreuses et il faudra probablement beaucoup de temps avant de parvenir à faire bouger les lignes. Car, pour le moment, dans l’esprit des hommes politiques locaux, mais aussi des Parisiens eux-mêmes, voir une Torre Agbar (tour signée Jean NOUVEL, à Barcelone) surgir de terre en plein cœur de leur cité demeure une gageure.

    Or, tant que ces constructions ne seront perçues comme bonnes que pour la banlieue (La Défense, Issy-les-Moulineaux, Levallois-Perret, etc.), ou pour les quartiers dits « périphériques » comme Masséna, la Chapelle, ou la porte de Versailles*[4], le débat ne pourra pas se tenir sereinement. Et Paris risque bien d’accumuler encore du retard par rapport à d’autres grandes métropoles mondiales qui pour beaucoup ne se posent même pas la question, à l’image des villes anglo-saxonnes. Que la décision soit d’ailleurs ou non favorable à l’implantation intra-muros d’IGH, car dans le cas contraire, ces atermoiements n’auront eu comme conséquences que d’affaiblir un peu plus l’économie parisienne en détournant les attentions des véritables questions.

    C’est ici que l’action d’échelons administratifs supérieurs efficaces, comme le Grand-Paris, pourrait être déterminante. Mais, pour le moment, eux aussi demeurent une gageure.

    Eric BAIL pour èV_

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    [1] Quoique la tour en elle-même, tant décriée, n’est guère plus horrible que beaucoup d’autres. Certains la trouvent même plutôt à leur goût : voir ce qu'en disait F. MITTERRAND (in Criticat #1) ou ce à quoi elle peut servir :

    En revanche, quand on observe les alentours, c’est une véritable catastrophe :

    ü  La tour apparaît comme un objet posé au milieu de nulle part, qui masque la gare, et qui de par sa très haute silhouette (elle demeure l'immeuble le plus haut de France à ce jour) bouleverse le paysage parisien : posez vous par exemple, comme le font les millions de touristes qui arpentent chaque année la capitale, sur le parvis du Trocadéro ou sous la Tour Eiffel et vous saisirez très vite l’absurdité de cet emplacement ;

    ü  Le centre commercial est peu visible, mal conçu avec un étage extérieur dont on saisit assez mal l’utilité. Surtout sa dégradation est telle que les travaux y sont presque perpétuels ;

    ü  La gare et son parvis sont inadaptés à un tel lieu d’échange. Et les tentatives pour réparer les dégâts initiaux ont connu peu de succès : comme la tentative de la SNCF de re-donner une véritable façade à la gare, pour lui conférer une identité visuelle claire, et la rendre identifiable.

    ü  Enfin, la voirie du quartier est chaotique et dangereuse pour le piéton. Descendre par exemple du bus « 28 » et vouloir rejoindre la rue de Rennes est un véritable parcours du combattant. Priez pour arriver en un seul morceau d’autant plus depuis l’aménagement en portion centrale des couloirs de bus du boulevard du Montparnasse.

    [2] On pourrait d’ailleurs dire exactement la même chose concernant le réaménagement du quartier des Halles.

    [3] Le Plan local d’urbanisme qui remplace le POS (Plan d’occupation des sols) est la véritable « bible » de la planification urbaine d’une commune, dans le respect du Code de l’urbanisme.

    [4] Même si l’argument selon lequel ces constructions seraient un bon moyen de constituer un lien, « une zone tampon entre la capitale et les communes limitrophes » est recevable.

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    Sources : paris.fr ; parisobs.com ; dailymotion.com

    **Après avoir lu le livre de Virginie LEFEVRE (références ci-dessous), je dois reconnaître, dans cette version corrigée, mon erreur initiale. L’opération Maine/Montparnasse étant tout sauf une opération urbaine non planifiée et de petite ampleur. Comme dirait le « Canard Enchaîné », pan sur le bec… Ne loupez en tout cas pas le livre de Mme LEFEVRE (Virginie), Paris-Ville moderne, Maine/Montparnasse, La Défense, Paris, Norma, 2003.

    Version du vendredi 11/VI/2010.


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  • 4/transports.L

    Les années se suivent et ne se ressemblent pas. C’est effectivement ce que doit se dire l’architecte français Jean NOUVEL. En effet, 2007 restera, pour lui, marquée p4/transports.ar deux échecs majeurs à Paris. D’abord, son projet pour les Halles non retenu alors qu’il était pourtant bien plus ambitieux que la proposition concurrente de MANGIN*[1]. Puis, son « Objet expérimental » pour la Tour Phare, déjà à la Défense, retoqué par le jury qui lui préféra « l’émergence hybride » de l’Américain Thom MAYNE*[2], peut-être plus consensuelle. L’année 2008 est, en revanche, tout autre. En janvier, Jean NOUVEL recevait le plus célèbre des prix d’architecture, le prix Pritzker, qui n’avait jusqu’à présent consacré qu’un seul de ses confrères et compatriotes, non moins célèbres, Christian de PORTZAMPARC. Mais, un bonheur n’arrivant jamais seul, Patrick DEVEDJIAN, président de l’EPAD*[3] vient d’annoncer, qu’au terme d’âpres discussions, le jury composé de représentants de collectivités locales, de l’Etat, ainsi que de diverses personnalités (dont il est vrai peu d’architectes), l4/transports.’avait désigné lauréat pour la construction de la future tour Signal de La Défense*[4].

    Après l’Institut du monde arabe (1981/7), la fondation Cartier (1994) et plus récemment le musée du Quai Branly, en 2006, décrié mais dont le succès auprès du public ne se dément pas, une nouvelle réalisation forte signée Nouvel devrait donc voir le jour à Paris d’ici 2015.

    La tour du renouveau ?

    Forte ! Telle est bien le mot à utiliser lorsque l’on jette un œil au projet que nous ont concocté les Ateliers Jean Nouvel (AJN). Déjà, de par sa masse imposante, un parallélépipède de 301 mètres de haut et de 140 000 m² au total*[5], et de par ses particularités (cubes colorés, façades aux mailles variables) qui attireront les regards comme un aimant, elle permet le rééquilibrage du skyline de La Défense. Et si telle n’est pas sa singularité, les autres projets en compétition y parvenaient également, elle le réalise to4/transports.utefois à merveille et sans doute beaucoup mieux que les autres. D’autant que ces cubes creusés contrebalancent merveilleusement le vide de la Grande Arche dans une composition qui frôle le lyrisme.

    Mais surtout, elle apparaît comme un geste architectural atypique dans le paysage du quartier d’affaires. Certes, le bâtiment ne rompt pas fondamentalement avec la forme classique des tours de très grande hauteur (IGH, pour immeubles) qui demeurent, malgré l’originalité architecturale dont elles peuvent faire preuve, monolithiques et consacrées à des bureaux (le plus souvent), des logements (de haut standing généralement) et/ou des centres commerciaux. Elle innove en revanche car chacune de ses quatre composantes cubiques*[6] est évidée afin d’y loger places publiques, jardins ou encore terrasses de cafés et de restaurants. Ces loggias colorées, pour le moment de bleu, de blanc, de rouge et de vert, seront protégées par d’énormes protections vitrées coulissantes autorisant les ventilations salvatrices et la pénétration des rayons du soleil. Il faudra voir si à la pratique, ces lieux ne se transforment pas en vastes caisses de résonance, difficilement vivables au quotidien, comme le sont souvent les espaces clos ou semi-clos à l’image des passages, la Galleria Umberto Ier à Naples en est un célèbre exemple, ou des phalanstères, comme le familistère de Guise.

    En attendant, on assiste peut-être là aux prémices d’un urbanisme tout en hauteur comme l’a imaginé le cabinet Popular Architecture pour le Londres des années 2020 (je vous en parlais ici – à venir). La tour Signal pourrait alors révolutionner*[7] la conception des futurs gratte-ciel du monde et redonner à4/transports. Paris et sa région la place qu’ils méritent dans ce débat au moment même où la tour en tant que concept apparaît comme tabou en intra-muros et dans le langage des décideurs politiques locaux. D'ailleurs, preuve de cette frilosité, la député-maire UMP de Puteaux, Mme Joëlle CECCALDI-RAYNAUD, commune sur laquelle la tour Signal sera implantée, a immédiatement réagi après l’annonce du 27 mai dernier*[8] en brandissant l’arme du POS (Plan d’occupation des sols) dont la modification est le préalable indispensable à son érection, menaçant du même coût de faire échouer le projet. Ce qui serait, quelque soit la pertinence de ses griefs*[9], absurde puisqu’il s’agit de la décision d’un jury représentant la collectivité, mais surtout dommageable à l’architecture parisienne qui a déjà subi avec la « non-décision » pour les Halles un rude coup ces derniers temps*[10].

    Eric BAIL pour èV_

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    [1] Ce projet bien que lauréat ne verra jamais le jour puisqu’un autre concours concernant le carreau lui-même a été lancé par la mairie de Paris (remporté depuis par BERGER et ANZIUTTI). En somme, le seul geste architectural que MANGIN proposait n’a pas été conservé dans la version définitive. A voir le documentaire de Frédéric BIAMONTI, « Le destin des Halles », durée 52 minutes, production France 5/AMP, 2004.

    [2] La Tour Phare signée NOUVEL, affublée d’un gigantesque écran rotatif à son sommet, a sans doute effrayé les plus conservateurs. Elle incarnait pourtant à merveille l’idée à l’origine du projet, celle d’un phare illuminant le renouveau du premier quartier d’affaires d’Europe.

    [3] Etablissement public pour l’aménagement de la Défense, organisme public chargé de coordonner les projets d’urbanisme dans le quartier de la Défense (plusieurs communes concernées dont Puteaux et Nanterre).

    [4] Dix-huit projets avaient été initialement retenus avant que cinq finalistes ne soient désignés en III/2007 : Ateliers Jean Nouvel ; Foster + Partners Ltd ; Jacques Ferrier Architectures ; Studio Libeskind Architect ; Wilmotte et Associées.

    [5] Pour un coût global estimé pour le moment à plus de 600 millions d’euros.

     [6] Cubes qui accueilleront approximativement chacune une fonction : centre commercial, restaurants, équipements publics au rez-de-chaussée (10 000 m²) ; bureaux (50 000 m²) au second ; un hôtel de 40 000 m² et de plus de trois cents chambres au troisième ; enfin, au sommet, des appartements (33 000 m²).

    [7] Au sens corbuséen du terme « On ne révolutionne pas en révolutionnant, on révolutionne en solutionnant » in Urbanisme, 1924.

    [8] Utilisant les mots de « donjon » et de « monolithe qui écrase tout » pour qualifier la tour de Nouvel, parlant même de « retour au Moyen-âge » (sic).

     [9] Elle a par exemple évoqué, très justement, le manque de mixité sociale du projet.

     [10] L’architecte a tenté de désamorcer ce début de crise en affirmant  « que sa copie n’est pas définitivement écrite »  et en promettant « d’expliquer [à Mme Ceccaldi-Raynaud ndlr] en quoi ce projet est optimiste et humaniste (sic) ».

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    Source photos : tour-signal-ladefense.com

    Version publiée initialement sur PériphériK le 06/VI/2008 ; remise à jour le lundi 07/VI/2010, et que vous pouvez compléter avec l’article « AJN/La Défense : nouvel acte manqué ? »


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